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Location meublée et cotisations sociales : une interprétation de l’URSSAF

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Pour les loueurs saisonniers, l’URSSAF ajoute, aux recettes saisonnières, les recettes issues des locations de longue durée pour déterminer le franchissement du seuil de 23 000 €.

1. Ce qu’il faut retenir

L’URSSAF a fait paraître une note, en date du 15 novembre 2021, indiquant que les  cotisations sociales sont dues en lieu et place des prélèvements sociaux, lorsqu’un loueur en meublé perçoit :

  • Plus de 23 000 € de recettes de locations de meublés de longue durée et tire de cette activité la majorité de ses revenus (c’est-à-dire les LMP au sens de l’impôt sur le revenu),
  • ​Plus de 23 000 € de recettes de locations de meublés de courte et/ou de longue durée (c’est-à-dire, par hypothèse, les LMNP au sens de l’impôt sur le revenu)

Elle ajoute que « le seuil de 23 000 € s’apprécie en cumulant le revenu des locations de courte et de longue durée et au sein du même foyer fiscal ».

Ainsi, l’URSSAF considère que tout loueur en meublé qui encaisse plus de 23 000 € de recettes, dans son foyer fiscal, est assujetti aux cotisations sociales s’il encaisse au moins 1 € de loyer issu d’une location saisonnière !

Cette vision est contradictoire avec le texte de loi et même avec l’esprit de la loi de 2017 exposé dans le dossier de presse du projet de la LFSS pour 2017 et dans les fiches d’évaluations de la LFSS pour 2021.
Certes, cette note n’a aucune portée légale, mais elle montre la vision de l’URSSAF qui risque fort de se traduire par des contentieux dans les mois et années à venir…

2. Conséquences pratiques

L’esprit de la loi n’est pas ambigu. Ainsi, l’annexe 9 « fiches d’évaluations de la LFSS de 2021 » (p. 41) précise clairement que « la LFSS pour 2017 a prévu une frontière simple pour distinguer les situations dans lesquelles les revenus d’un particulier sont considérés comme des revenus du patrimoine de celles dans lesquelles il s’agit d’une activité professionnelle : en dessous d’un seuil de 23 000 euros de chiffre d’affaires pour les locations saisonnières d’appartement et de maison meublés […], les revenus demeurent considérés comme des revenus du patrimoine […] assujettis à prélèvements sociaux et fiscaux. »

Avis du Cabinet IPEUS PATRIMOINE :

Loueurs saisonniers

L’URSSAF entend assujettir aux cotisations sociales (qui peuvent aller jusqu’à 43 %) en lieu et place des prélèvements sociaux à 17,2 %, les loueurs qui perçoivent au sein de leur foyer fiscal plus de 23 000 € TTC de recettes issues de location meublée saisonnière ou de location de longue durée (« 23 000 € pour les locations de meublés de courte et/ou de longue durée »).

Or,  l’article L611-1, 6° du Code de la Sécurité sociale ne vise, à notre sens, que 2 types de loueurs :

  • les loueurs professionnels au sens de l’impôt sur le revenu : c’est-à-dire ceux qui génèrent plus de 23 000 € de recettes de location (saisonnière ou non) et dont les recettes représentent la majorité des revenus d’activité y compris les pensions et retraites,
  • les autres loueurs (par hypothèse LMNP) qui tirent de la location saisonnière des recettes conséquentes (à savoir plus de 23 000 €).

Pour les loueurs saisonniers, l’URSSAF entend ajouter à ces recettes, celles issues des locations de longue durée pour déterminer le franchissement du seuil de 23 000 €.

Or, l’intention du législateur en 2017 modifiée en 2021  était uniquement de faire cotiser les loueurs qui ne se contentent pas de gérer leur capital mais exploitent leur bien en vue d’en tirer un profit, notamment en fournissant certaines prestations complémentaires à des fins professionnelles (telles les locations saisonnières qui, généralement, sont assorties de prestations de services).

Cette « interprétation » de l’URSSAF conduirait, de manière aberrante, à ce que des loueurs qui retirent peu de recettes saisonnières cotisent sur l’ensemble de leurs locations meublées (saisonnières ou non).

Notez que le franchissement du seuil de 23 000 € s’apprécie au niveau du foyer fiscal pour la qualification de loueur professionnel au sens de l’impôt sur le revenu. Compte tenu du renvoi opéré par l’article L611-1 du Code de la sécurité sociale vers l’article 155, IV, 2, du CGI, le seuil de cotisation s’apprécie de même au niveau du foyer fiscal. Néanmoins, seuls les BIC encaissés par la personne ou les personnes exploitantes restent assujetties à ces cotisations.

LMP

A l’inverse, pour les LMP, l’Urssaf semble considérer, de façon surprenante, qu’il faille apprécier le seuil de 23 000 € au regard des seules recettes provenant de la location de longue durée (à l’exclusion donc des recettes issues des locations saisonnières).

Cette précision est en contradiction avec la note de portée générale concernant l’appréciation globale de ce seuil, et avec les termes même de la loi qui ne différencie pas en fonction de la nature de la location. S’agirait-il d’une erreur ?

L’URSSAF omet par ailleurs de préciser que la comparaison s’opère avec les revenus d’activité, pensions de retraites et rentes viagères incluses, du foyer fiscal (et non uniquement des revenus du loueur).

Egalement, l’URSSAF indique qu’une régularisation doit être faite au titre des revenus 2021, 2020 et 2019 : il est difficile déterminer si cette précision concerne l’ensemble des loueurs ou uniquement les loueurs saisonniers.

Si cela devait concerner l’ensemble des loueurs, cette précision de l’URSSAF serait également contestable. En effet, les critères de détermination des LMP retenus par l’URSSAF, à savoir 23 000 € de recettes et ces recettes doivent représenter la majorité des revenus, sont issus de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, applicable à compter du 1er janvier 2021.

Avant cette date (et notamment pour 2020 et 2019), les LMP étaient soumis aux cotisations sociales si 3 critères étaient remplis :

  • être inscrit au registre du commerce et des sociétés (RCS) (art. 155, IV, 2, 1° du CGI)
  • percevoir des recettes de locations meublées supérieures à 23 000 € (art. 155, IV, 2, 2° du CGI),
  • ces recettes devaient être supérieures aux autres revenus professionnels du foyer fiscal (art. 155, IV, 2, 3° du CGI).

En appliquant les nouveaux critères aux revenus 2019 et 2020, l’URSSAF rend cotisables au titre de 2019 et 2020, les loueurs qui réalisaient plus de 23 000 € de recettes et dont les recettes représentant la majorité de leurs revenus mais qui n’étaient pas inscrits au RCS au tant que LMP.

Pour ces loueurs, outre le désagrément depuis janvier 2021 (soumis jusqu’à 43 % de cotisations sociales au lieu des 17,2 % de prélèvements sociaux), ils auraient aujourd’hui un effet rétroactif !